Tout le monde a déjà entendu parler de la Première Guerre Mondiale. Nous connaissons tous les noms de grandes batailles comme Verdun, le Chemin des Dames mais beaucoup de luttes pour la libération de la France restent inconnues du grand public.
Avez-vous déjà entendu parlé de la ville de Le Quesnoy?
Je ne pense pas alors suivez-moi pour la visite du Musée néo-zélandais de la Libération – TE ARAWHATA.
Le musée néo-zélandais TE ARAWHATA
Localisation
Le Quesnoy, la cité des Chênes fait partie du Parc Naturel Régional de l’Avesnois.
Le musée est installé 18 Rue Achille Carlier dans l’ancienne gendarmerie.
Il est ouvert du mercredi au dimanche de 9h30 à 17h.
Le projet
Ce musée a été inauguré le 11 octobre 2023 dans la petite ville de Le Quesnoy située dans le Nord.
Les bâtiments ont été rachetés puis d’importants travaux ont été réalisés. Le tout a été financé par des dons et des collectes de fonds s’élevant à 15 millions de dollars néo-zélandais soit environ 8.5 millions d’euros.
Dans le musée, des plaques avec les noms des généreux donateurs sont accrochées pour rappeler leur générosité et leur participation à ce beau projet.
Le concept
Ce musée est le seul du genre en France et en Europe. Il s’agit du premier musée commémoratif néo-zélandais.
A travers le récit de la libération de la ville quercitaine, il s’agit d’un hommage à tous les soldats kiwis qui se sont engagés dans ce conflit meurtrier, un rappel des actions remarquables qui ont été les leurs. Ce ne sont, en effet, pas moins de 12 500 hommes qui ont perdu la vie en France et en Belgique pendant la Première Guerre Mondiale.
Hommes dont les corps ne sont jamais repartis et qui reposent pour beaucoup dans les cimetières militaires.
Le musée est inspiré par les thèmes de la liberté, de l’avenir et de l’amitié entre la France et la Nouvelle-Zélande. C’est un lieu pour tous, un lieu où non seulement les Kiwis, mais aussi les gens du monde entier, peuvent visiter et célébrer la liberté, l’amitié et comprendre l’importance de tirer des leçons du passé pour construire un avenir meilleur.
Visiter Te Arawhata, c’est aller à la rencontre de ces hommes mais aussi de l’Humanité.
Vivre au Quesnoy pendant la guerre
Durant la Première Guerre Mondiale, la ville de Le Quesnoy, comme beaucoup d’autres communes du Nord, a été occupée par les Allemands. Ils se sont emparés de Le Quesnoy le 23 août 1914 après la bataille de Mons et y sont restés jusqu’au 4 novembre 1918 .
Après près de 4 ans de privation, la libération par les soldats néo-zélandais fut un soulagement. La vie était en effet rude, les habitants devaient fournir tout ce dont avaient besoin les occupants. Les animaux étaient ainsi répertoriés et réquisitionnés du jour au lendemain. Les restrictions de nourriture faisaient partie du quotidien. La ration de farine, par exemple, n’a fait que diminuer tout au long de la guerre.
Le musée retrace la vie de ces habitants à travers de nombreux documents mis à disposition des visiteurs. Prenez le temps de vous installer pour consulter les documents numérisés.
Vous apprendrez notamment que de nombreux habitant étaient des travailleurs civils obligés de travailleur pour l’occupant.
Une BD sur tablette tactile explique la vie des enfants sous l’occupation. Etre enfant ne dispensait pas des corvées et nombreux étaient ceux qui devaient travailler pour les Allemands. Il est notamment question d’enfants qui pendant des heures ramassaient des mûres au milieu des ronces et qui revenaient chez eux les vêtements tachés de sang.
Mais au milieu de cette vie contraignante, certains enfants ont montré qu’ils étaient toujours en chantant la « Marseillaise », acte défiant l’autorité de l’occupant.
Cette salle retrace la vie de personnages civils et militaires. Installez-vous et prenez le temps de lire et de découvrir leur histoire. Leur histoire est narrée en français et en anglais.
La libération de Le Quesnoy
Le contexte
A la fin de la guerre, les Allemands reculaient face à la pression des Alliés mais pas question de baisser les armes. Les officiers demandaient aux soldats de tenir bon face à la pression exercée
Les Allemands ont dû faire face à de nombreuses offensives comme à Vimy où les soldats canadiens ont remporté la victoire lors de la bataille de la crête de Vimy entre le 9 et le 12 avril 1917.
Le 4 novembre 1918, soit plus d’un an plus tard, est une date à marquer d’une pierre blanche dans l’histoire de Le Quesnoy puisqu’il s’agit de sa libération des mains allemandes.
Henry Armytage Sanders, lieutenant de l’armée kiwi, fut le témoin des combats avec l’armée allemande. En tant que photographe de guerre officiel, il immortalisa les conditions de vie de ses frères d’armes, mais aussi les effroyables pertes.
Certaines de ses photos sont à découvrir dans la salle qui lui est consacrée. On y voit également des portraits d’habitants rencontrés.
Les soldats kiwis
Origines
Venus du bout du monde, les soldats néo-zélandais s’engagèrent volontairement pour quitter leur pays en direction de l’Europe. Malgré son éloignement géographique des conflits, la Nouvelle-Zélande est entrée dans la guerre avec grand enthousiasme: les dons financiers ont afflué et, bien que le pays n’ait pas encore institué le service militaire obligatoire, le nombre de volontaires a largement dépassé les besoins.
La New Zealand Army faisait partie de l’ANZAC (en anglais, Australian and New Zealand Army Corps). Des Néo-zélandais d’origine européenne, des Maoris, des Océaniens mais aussi des Niuéens furent incorporés dans cette armée. Des hommes d’origines différentes mais des hommes ayant vécu les mêmes joies, les mêmes peines.
Le rugby dans l'armée néo-zélandaise
Dans le musée néo-zélandais de la libération, une exposition temporaire intitulée « From the field to the front » est consacrée au rugby et aux All Blacks. Je ne le savais pas mais des All Blacks ont intégré l’armée néo-zélandais et ce sport a continué d’occuper une place importante dans la vie des soldats kiwis.
Dès qu’ils en avaient l’occasion, les soldats (All Blacks ou non) jouaient au rugby pour se détendre, passer un moment ensemble avant de repartir pour des moments terribles.
Parmi les joueurs professionnels, certains sont revenus.
D’autres n’ont malheureusement pas eu cette chance. Ce fut le cas, entre autres de James Baird, Eric Harper, Albert Downing dont les corps reposent dans les Hauts-de-France.
Parmi ceux qui sont revenus, certains ont pu reprendre leur carrière sportive comme Winiata.
D’autres gravement blessés ou brisés mentalement par la guerre et ses horreurs ont malheureusement dit au revoir au rugby.
Le déroulement de la libération de Le Quesnoy
Les officiers kiwis voulant préserver la vie des civils décidèrent une offensive ne faisant pas appel à l’artillerie lourde. Elle aurait causé d’importantes pertes humaines et des dégâts matériels à la ville fortifiée. (La ville avait été fortifiée au XVIIème siècle par le célèbre Vauban).
Ils préférèrent donc utiliser 500 barils de pétrole qu’ils enflammèrent pour créer un écran de fumée permettant au peloton de brigadiers d’approcher de la ville et de ses remparts.
La particularité de la ville est la présence de remparts qu’il faut parvenir à franchir.
Il existe bien des portes mais comme vous vous en doutez, elles étaient très surveillées car l’accès y était facile !
Ce qui l’était bien moins ailleurs en raison de la présence de fossés inondés et des hauts remparts.
Pour pouvoir entrer dans la ville, pas d’autres choix que de passer au-dessus des remparts. Le seul moyen était d’utiliser des échelles. Moyen qui semble tellement dérisoire et qui pourtant fut la clé de la réussite de l’offensive.
Trouver le bon endroit fut complexe car à bien des endroits les échelles étaient trop courtes pour les murailles de plus de 13m. Et pourtant, les soldats trouvèrent enfin une faille et sur les 4 échelles érigées, l’une d’elle parvint à l’objectif. Les hommes menés par le sous-lieutenant Averill suivi du sous-lieutenant Kerr et de son peloton arrivèrent en haut malgré les feux nourris.
Lors de l’assaut mené le 4 novembre 1918, 1600 habitants furent libérés tandis que 2000 soldats allemands furent contraints de se rendre.
Le bilan fut lourd parmi les soldats kiwis puisque 400 furent blessés et 93 tués. 65 reposent dans le cimetière de Le Quesnoy.
Pour remercier les soldats kiwis, venus du bout du monde pour les libérer de l’oppresseur, les habitants leur ont offert de la nourriture mais aussi des fleurs d’automne. Le sous-lieutenant Averill eut également ses fleurs.
Pour rendre hommage à son courage exemplaire, la ville de Le Quesnoy le nomma Citoyen d’Honneur en 1968 et la France le nomma en 1973 Chevalier de la Légion d’Honneur.
Récit d’un soldat kiwi
« Les civils du Quesnoy étaient depuis quatre ans sous domination allemande et leur joie explosa littéralement. Leur bonheur d’être libérés faisait plaisir à voir. Nous étions couverts de boue, fatigués et marqués par les affres de la bataille. Mais tout le monde, femmes, vieillards, enfants et même les Petites sœurs des pauvres sortaient des caves pour venir à notre rencontre en riant et en criant, ils nous envoyaient des baisers, des fleurs et même de la nourriture.
C’est le 4ème bataillon qui était entré le premier en ville… mais le second bataillon marqua un point quant il vint avec son propre orchestre. Quant les drapeaux tricolores apparurent et qu’on joua « La Marseillaise » dans le square, la plupart des vieux pleurèrent sans retenue. »
Te arawhata
Comme vous l’avez compris, l’échelle est l’objet emblématique de cette libération néo-zélandaise.
Et c’est pour cette raison que l’échelle est au coeur du musée auquel elle a d’ailleurs donné son nom car « Te arawhata » en maori signifie échelle.
Une représentation artistique est à découvrir sur place. Elle accompagne l’escalier d’origine sur lequel ont été apposés des mots motivants qui invitent à la réflexion.
Te arawhata, c’est elle qui a permis à ces hommes venus du bout du monde de libérer la ville.
Après la victoire, il est temps de ne plus monter, de ne plus être dans l’urgence, de prendre un moment pour reprendre pied…
Au rez-de-chaussée, vous serez impressionné, voire ému comme moi, par ce gigantesque soldat de la brigade de fusiliers néo-zélandais. Cette statue s’inscrit dans la lignée des soldats hyperréalistes Wētā Workshop créés pour l’exposition Gallipoli : « The Scale of Our War » à Te Papa à Wellington.
Réalisé à partir des dernières innovations technologiques en matière de fabrication, ce soldat kiwi est assis sur un chemin pavé, son fusil posé à ses côtés. L’oeuvre le représente alors qu’il est en pleine réflexion après la libération. Temps de réaliser ce qui s’est passé, temps de penser à ses frères tombés au combat, de réaliser que l’on est vivant, temps de penser au chemin parcouru et à parcourir, temps de penser aux siens si loin à ce moment-là…
Après la guerre
La ville de Le Quesnoy reconnaissante
Les soldats néo-zélandais sont progressivement rentrés chez eux. Ils n’ont pas oublié ces hommes, ces femmes qu’ils avaient sauvés. Ils n’ont pas oublié leurs frères qu’ils avaient laissés en France, en Belgique.
La Nouvelle-Zélande n’a pas oublié ses enfants sacrifiés. Le Quesnoy n’a jamais oublié ces hommes du bout du monde qui ont risqué leur vie, perdu leur vie pour certains.
Des liens forts sont restés entre les sauveurs et les sauvés.
Un peu partout au Quesnoy, on trouve des traces de cette amitié.
- l’avenue des Néo-Zélandais
- le chemin de la mémoire avec la plaque néo-zélandaise
- la salle d’exposition des Néo-Zélandais
- l’école maternelle du docteur Averill
- le jardin du souvenir
Le mémorial, inauguré le 14 juillet 1923 en présence du Maréchal Joffre, rappelle le courage des soldats montés l’un après l’autre le long de l’échelle sans savoir vraiment ce qui les attendait une fois arrivés en haut.
On y reconnaît des soldats, une femme ailée symbolisant la liberté, la palme
symbole de la victoire, les croix, en bas à gauche, qui rappellent qu’il y a eu de nombreux morts durant cette journée. De chaque côté du monument, on reconnaît les emblèmes de la Nouvelle-Zélande et du Quesnoy, ainsi qu’une épitaphe : « L’honneur des hommes de la Nouvelle-Zélande grâce à la valeur desquels la ville de Le Quesnoy fut rendue à la France le 4 Novembre 1918 ».
Au pied ont été plantées des fougères, ces mêmes fougères que l’on retrouve dans le musée.
Le Nord est la terre des Géants. De nombreuses communes ont le leur. Le Quesnoy ne déroge pas à la règle avec Pierrot Bimberlot qui porte un panier et distribue des friandises aux enfants sages.
Depuis quelques années, il a été rejoint par « Maori« , son cousin germain par alliance venu de Nouvelle-Zélande.
L'amitié entre la France et la Nouvelle-Zélande
Une amitié inscrite dans le temps
L’amitié entre les deux pays est célébrée dans le musée.
L’amitié entre les deux pays perdure à travers les décennies. D’anciens soldats sont revenus foulés ces terres qu’ils avaient libérées. Le docteur Averill est revenu plusieurs fois dans le cadre des commémorations puis ce fut le tour de son fils Collin.
Un jumelage entre la ville de Cambridge (Waikato) est actif depuis des années.
Le musée néo-zélandais de la Libération permet aux Français de venir découvrir l’histoire de ces hommes venus du bout du monde et aux Néo-Zélandais de venir sur la trace de leurs ancêtres pour certains, à la rencontre d’une période importante dans l’histoire du pays !
Dans le musée, une pièce, « Te ara Kutu » est consacrée à la réflexion sur cette visite multisensorielle.
De nombreux visiteurs y ont laissé une trace de leur passage.
C’est l’occasion de s’installer quelques minutes, de penser à ce que l’on a vu, lu, écouté, ressenti.
Il est alors temps à mon tour de repartir dans mon quotidien et de quitter ce musée que j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir. J’espère que cette visite vous a intéressé et vous a donné envie de vous rendre jusqu’à Le Quesnoy.
L’Avesnois regorge de lieux à découvrir aussi bien pour les amateurs d’histoire que de nature.
N’hésitez pas à aller vous promener à quelques kilomètres de Le Quesnoy dans la magnifique Forêt de Mormal ou au Forum de Bavay.





































8 réponses
Très beau reportage de l’histoire locale et marquante pour l’Avesnois. Le New Zealand Liberation Museum – Te Arawhata est réellement un site de mémoire majeur dans les Hauts-de-France. En tant que Quercitain d’origine, je suis fier pour la ville et l’accueil des touristes. Grâce à ce blog et ce reportage, tu contribues à la valorisation de l’Avesnois. Bravo!! 🙂
C’était un plaisir de découvrir ce musée et d’en parler ici et sur mon compte instagram. J’espère que l’article aura donné envie à d’autres personnes de faire le déplacement jusqu’au Quesnoy pour découvrir ce morceau d’histoire pas si lointain.
Alors là bravo pour ce magnifique article ! La visite a dû être émouvante !
Merci pour toutes ces explications liées à la libération de la ville de Le Quesnoy. Je ne connaissais pas cette histoire, bravo à ces soldats pour leur courage !
Oui, ce fut une belle découverte ! Tout ce qui touche à la première guerre mondiale m’intéresse beaucoup !
J’ai apprécié cette visite et toutes les informations toujours très complètes
Un très beau reportage
merci ma Florence….
Merci beaucoup Michèle 🙏
Un magnifique musée qui rend un bel hommage à tous ces soldats kiwis venus défendre la France. Merci Florence pour ce beau partage, explications, photos et ne pas oublier tous ces hommes courageux 🙏😘
Un musée que je garderai longtemps en mémoire ! Merci d’avoir pris le temps de le découvrir 🙏